LOYTON

But de l’opération :

Envisagée dès le mois de mai dans l’idée de percer le massif des Vosges, l’Opération LOYTON a été définitivement décidée en juillet 44.
Elle est une pièce principale du dispositif prévu par l’état-major allié pour préparer et sécuriser l’offensive vers l’Alsace... et le Rhin.
En effet, un franchissement du massif vosgien en son centre est mis au point début août et planifié pour fin septembre au plus tard.

La stratégie alliée repose sur l’offensive éclair imaginée par le général Patton (sa 3ème armée avance alors sur une ligne de front qui s’étire de Chaumont aux Ardennes, déployée face à la barrière du massif des Vosges).
Le but : casser le front allemand en perçant par le centre du massif et plonger droit sur le cœur de l’Alsace par la vallée de la Bruche  :

 C’est le plus court chemin vers le Rhin. Et pour faire face, la Wehrmacht devra dégarnir ses forces situées au nord (Col de Saverne) et au sud du massif (Trouée de Belfort).
 Une percée simultanée sera possible vers Strasbourg en contournant le massif par le nord depuis les environs de Baccarat (la mission que réalisera, plus tard, la 2ème DB de Leclerc)
 Cette offensive soulagera la prévisible difficile poussée du 6ème groupe d’armées de Devers vers Mulhouse et Colmar (de Lattre et Patch enveloppant le massif par le Sud depuis la trouée de Belfort et Chaumont-Langres)

Le piège repose sur l’effet de surprise, et implique de passer par où on ne s’y attend pas : les « petits » cols, du Donon, de Prayé, du Hantz, de Saales, du Las... pour converger sur la vallée de la Bruche.
C’est pourquoi l’Opération LOYTON a eu lieu dans la vallée du Rabodeau, centrée sur le village de Moussey.

L’Opération LOYTON est la plus vaste des opérations de la guerre menée par le 2éme SAS sur le territoire français.
Une autre opération chargée de préparer le passage nord du massif (secteur Saint Avold-Saverne) lui est directement attachée : l’Opération PISTOL.
Dans les mêmes temps se déroulent au sud du massif les opérations HARDY et WALLACE. Ces 3 opérations simultanées, préparatoires du franchissement des Vosges, sont dirigées par le 2ème SAS.

Composition :

Le Lt colonel Brian Franks, commandant du 2ème SAS, vient diriger en personne sur le terrain, et 102 hommes et femmes des Forces Spéciales britanniques et françaises sont parachutés en 7 principales vagues, plus 3 de matériels, échelonnées de août à septembre 44 :
 4 agents féminins du SOE, (dont une française Andrée BORREL), qui ont pour mission de préparer le terrain aux parachutages à venir, en prenant contact avec la Résistance locale dès le printemps 1944. Les 4 seront exécutées au camp NN du Struthof le 6 juillet 1944 ;
 2 équipes du F Phantom à 4 personnels (détachement du GHQ Liaison Regiment intégré à la SAS Brigade pour la reconnaissance et les transmissions) : Captain John Hislop, Lieutenant Peter Bowater Johnsen, Sergeant Len Owens, Sergeant Gerald Donovan Davis, Signalman George Gourlay Johnston, Signalman Peter Bannerman ;
 L’équipe Jedburgh "Jacob" : Captain Victor Gough, capitaine "Baraud" (Maurice Boissarie), Sergeant Seymour (radio) ;
 73 officiers, sous-officiers et spécialistes du 2ème SAS ;
 Le lieutenant DERRINGER, résistant français parachuté pour faire officier de liaison auprès du "GMA VOSGES" ;
 10 hommes du 2ème SAS dans la cadre de LOYTON NORD.

Chronologie :

Elle commence par le parachutage de 15 hommes dans la nuit du 12 au 13 août à Le Mont (terrain baptisé "Anatomie") :
 L’équipe "Jacob" du SOE ;
 Les avant gardes du 2ème SAS, commandées par le Captain Druce, assisté du Captain de Lesseps (Français, alias Goodfellow) et du Lt Dill, complétés de 4 hommes (Sergeants Hay et Lodge, Pcts Crossfield et Hall)
 Un détachement de transmission du F Phantom, commandé par le Captain Hislop, avec le Sergeant Davis et de 3 hommes (Pcts Johnson, Stanley, Sulivan)

Elle se continue par 8 autres parachutages centrés sur Moussey :
 Nuit du 31 août au 1er septembre près de Veney (terrain "La Pédale", plus précisément lieudit L’Etoc) : le Colonel Franks, le Captain Whately-Smith, le Captain Sykes (officier de renseignement), le Lt Marx (appelé "Karl") et environ 20 hommes du 2ème SAS, une deuxième équipe du F Phantom avec le Lieutenant Johnsen, le Sergeant Owens... le commandant FFI Derringer (du BCRA, venu pour prendre le commandement du GMA Vosges) ;
 Nuit du 6/7 septembre près de Veney (terrain "Le Pré Barbier") : le Major Reynolds, le Lieutenant Black... et 12 hommes du 2ème SAS
 3 septembre à Gemainfaing et 6 septembre à Le Mont (terrain "Anatomie") : complément d’équipements et armement. Principalement destiné à l’équipement du 1er RCV FFI
 Nuit du 14 au 15, nuit du 19 au 20 et nuit du 21 au 22 septembre dans Moussey même (plateau de "La Charbonnière") : la suite des effectifs (environ 30 hommes), le complément des matériels, et 6 jeeps SAS !
 28 septembre à Vieux Moulin : réapprovisionnement, parachutage d’armes et argent pour le Maquis (1er RCV FFI)

Prévue pour durer 2 semaines, au plus 4 à 5, l’Opération LOYTON durera en fait 2 mois...!
Devant l’arrêt de l’offensive de Patton en Lorraine, les SAS de l’opération LOYTON sont obligés de s’exfiltrer vers l’ouest à compte de fin octobre afin d’échapper à la capture.

Le bilan est éloquent : sur les 94 participants, 36 morts à déplorer entre les opérations LOYTON et LOYTON NORD. Pendant plus de deux mois, les hommes du 2ème SAS vont harceler les Allemands, soutenir la Résistance locale, et monopoliser un nombre impressionnant de troupes allemandes, les détournant de fronts plus importants.